FITREMANN (Jean-Michel) –« ABC de la sexualité »-Édition GRANCHER, collection ‘’ABC’’ Paris 2004 (2002) – 463 pages – Quatre tableaux en annexe de A.1 à A.4 – Bibliographie.
Auteur et titre :
Cet ouvrage est le fruit d’une vingtaine d’années de recherche dans le domaine de la psychologie, la sexualité et la psychothérapie individuelle et de groupe sources de témoignages des thérapisants, complétant les vécus et formations personnels de l’auteur aux thérapies transférentielles et psycho-corporelles.
J. Michel Fitremann, docteur ès-sciences, ancien élève de l’école normale supérieure, psychologue clinicien spécialisé en psychopathologie, fait un travail de recherche sur la structure des psychoses en rapport avec le vécu corporel et sur les thérapies dans diverses traditions.
Il utilise dans son livre l’éclairage des grands mythes fondateurs et leur décodage pour explorer les racines profondes de l’inconscient individuel et collectif ainsi que l’apport de l’éthologie, de l’ethno et anthropologie.
Dans le cadre d’une collection « ABC », le sujet est abordé à la fois de manière exhaustive, du transgénérationnel – historique – conception… à la mort, et de manière conceptuelle dans ses aspects fondamentaux, scientifiques et spirituels tout en gardant un caractère « démocratique », plus ou moins accessible notamment grâce à un vocabulaire, autant que faire se peut, simple et notablement moins réservé, voire ésotérique ou corporatiste, que beaucoup d’ouvrages qui traitent avec sérieux de la complexité de la psyché.
Tout le contraire d’un livre de recettes ou d’initiation comme pourrait le laisser supposer ce titre « ABC », c’est une mise à disposition pour un plus large possible public de données psychologiques et existentielles fondamentales.
MOTS CLEFS
Psychologie, psychopathologie, corps, archaïque, programme, traumatisme, réparation, revécu, inconscient, émotion, sexuation, naissance, bonding-holding, père effectif, utérus externe, symbiose, fusion, lien, désir, amour, plaisir, orgasme, expansion de l’orgasme, excitation, jouissance, passion, sevrage, nature, lois naturelles, divinité, adulte, sentiment, mythe, abandon, mystère, transcendance, individuel-collectif, puissance de la vie, le plus-grand-que-soi, force animale, super-stimuli, monstre, fantasme, perversion, sadisme-masochisme, adultère-inceste, homosexualité, couple, génital, parentalité, énergie, chakra, inhibition, réflexe, instinct, répression sexuelle, Celtes, Sacré, joie corporelle, symbolique, plénitude de soi, unité, communion avec nous-même.
CONTENU
Au-delà des apparences et des comportements connus, notre sexualité est une lente construction invisible qui sous-tend tout le développement humain, personnel, mais aussi collectif.
La sexualité, thème central et sous jacent à l’ensemble de ses ramifications, est abordée avec un grand angle ; de la conception, naissance, enfantement et parentage, identité sexuelle et sociale, rôles sexuels, couples et idéologies de la sexualité, à la mort et transmission des valeurs.
En allant le plus loin possible dans les profondeurs des phénomènes psychologiques et psycho- sociaux, les racines des névroses et psychoses sont explorées : l’auteur décrit avec riches détails et explications qui se croisent comment ça se passe « quand ça se passe bien » et «quand et pourquoi ça se passe mal », dans la construction d’un individu et d’une société, évoquant également l’origine historique lointaine et les intérêts en jeu.
Notre attention est attirée sur la banalisation, la généralisation voire la normalisation de multiples idéologies et pratiques maltraitantes et traumatisantes pendant les différentes phases sensibles de construction de l’individu qui laissent des empreintes-enregistrements durables (… »on n’échappe pas à son histoire »)-cf. incs et émotionnel- sources de nos souffrances, échecs, somatisations, addictions diverses, limitations et difficultés à « grandir »…
Une myriade de pathologies – qui génère une « économie » – naît d’une société qui ne respecte pas le développement de ses individus, notamment pendant la période précoce archaïque hors de portée du souvenir conscient, relativement « oublié » et difficile d’accès ; « le normalement-névrosé » n’est pas une fatalité : c’est un « arrangement » avec une dose de résignation face à cette société maltraitante.
Ouvrage de synthèse des différents courants psychologiques-psychanalytiques – Freud, Jung, Eulagnier et leurs successeurs – et psycho-corporels émotionnels et énergétiques inaugurés par W.Reich, G.Boyesen…, son développement s’inspire aussi de manière éclectique de recherches scientifiques et de textes sacrés, avec un appui important sur les mythes, sollicitant également de nombreux auteurs contemporains.
Ecrit avec sérieux et une intention pédagogique, et certainement avec… plaisir : en effet la beauté des mots, du style traduit souvent l’émerveillement de l’auteur devant la complexité de l’humain, la puissance et les mystères de la vie ; plus spirituel que beaucoup d’écrits traitant de religion ou de spiritualité avec le mot « dieu » à chaque ligne ou paragraphe…
L’auteur fait acte et encourage à l’humilité devant les lois naturelles, le mystère du vivant, du « plus grand que soi » ; il montre la voie de la beauté de l’existence, de l’Amour (union avec nous-même) et de la réalisation de soi. Et ce notamment à travers les 80 pages consacrées à l’orgasme étayées entre autres sur une expérience d’animation de groupes « tantra ».
PHRASES et IDEES – clés
P 9 La sexualité nous trouble parce qu’elle fait resurgir nos peurs et souffrances ( et conditionnements = conflits internes ) les plus fortes alors qu’elle devrait être simple et récompensante.
P 14 La sexualité est donc une histoire de division de l’humanité, de reproduction, de filiation parents-enfants et de mort. La mort sans sexualité aurait rapidement achevé le monde ; la sexualité sans reproduction n’aurait pas de sens ni de but ; la reproduction sans la mort serait une calamité.
P 20 La pression constante de dégagement et de résolution des émotions enregistrées dans l’enfance, en même temps que nos efforts pour éviter ce dégagement, sont la motivation générale de pratiquement tous nos comportements ;…cette contradiction forme les « conflits intérieurs » et le besoin d’allégement de l’inconscient, « la compulsion de répétition ».
P 33 L’émotion est une construction complexe qui permet de gérer la relation à l’autre en tant qu’être distinct de soi. C’est un phénomène corporel de soulagement autonome des tensions lorsque l’enfant a affaire à une volonté autre que la sienne.
P 44 Ainsi, toute déviation dans le déroulement naturel de la conception, de la naissance, et du sevrage, que nous avons décrit plus haut va engendrer une anomalie de notre construction psychique, l’utilisation de procédés de survie, d’étayage ou de compensation, et une forme particulière de sexualité, de désir et de son objet, et de ses modalités d’assouvissement.
P 93 Chez les amants il y a une confusion constante entre l’état fusionnel (ce qui est bon), l’état organique (ce qui est fort), l’état extatique (ce qui est au-delà). En cherchant une rencontre charnelle qui devrait libérer et apaiser, ils ne rencontrent qu’une fusion sensorielle qui se nourrit d’un rêve et nourrit le rêve.
P 96 Pour qu’il y ait un véritable échange, il y aurait besoin de distance, d’individualité et d’indépendance.
P 102 Il n’est pas difficile de constater que dans la passion amoureuse c’est le drame de la naissance, l’appel du lien (bonding) et le besoin de symbiose qui se réactive en recherche de réparation.
P 112 La jalousie est la torture éternelle d’être dépossédé du lien à l’autre, et sa conséquence directe, la nécessité irrépressible de tuer ce qui paraît aimable, avoir un lien privilégié avec l’autre ou la vie.
P 122 Il a d’ailleurs été observé et même évalué dans les sociétés ordonnées où existent le respect de la naissance, du maternage et de la séparation, où il y a un « père collectif » puissant, que les enfants n’ont pas de traits pervers pas plus que les adultes n’ont de traits névrotiques ; Ces études ont été faites principalement chez les aborigènes d’Australie, de Nouvelle Guinée ou d’Amazonie, et ont été répétées au vu des résultats inattendus.
P 126 Devenir grand passe par constater et intégrer que nous sommes petits et impuissants devant ces gigantesques forces de vie à l’intérieur de nous et autour de nous.
P 141 Le « pouvoir » est cette recherche du contrôle absolu qui élimine l’autre. Contrôle de ses pensées pour qu’il ne puisse plus se concentrer ni évaluer. Interdit pour l’empêcher d’apprendre et de comprendre. Imposition de normes pour éliminer l’intolérable différence. Asservissement de son corps pour qu’il ne puisse ni sentir (la menace) ni réagir (en se protégeant ou en protestant). Quand on ne vit que selon soi-même, les dangereuses interactions sont écartées. La perturbation de l’autre évite la confrontation à la sienne propre. -cf. Harold Searles, « L’effort pour rendre l’autre fou ».
P 147 La nécessité pour toutes les formations émotionnelles enregistrées dans l’enfance de resurgir pour se dégager et finalement se décharger, tant que leur contenu énergétique (les tensions, la douleur) n’aura pas été dissous.
P 260 Le dégagement d’une tension psychique quelconque ne peut se faire que par mobilisation du corps.
P 153 Le but symbolique sur lequel tous deux (le sadique et le masochiste) s’accordent est en fait de prouver que « l’amour, c’est de la merde », ce qui est exactement leur enregistrement d’enfance.
P 175 Ce qui fait nous avons peu de choix :
a) nous évitons la relation, c’est-à-dire la vie, ce qui va prolonger l’attente d’un possible soulagement, et finir par nous laisser dans le désespoir d’arriver un jour à la satisfaction,
b) nous allons au feu de la relation et il nous faudra passer toutes sortes de « rendez-vous » émotionnels, qui équivalent à rejouer notre histoire d’enfance tout en tentant de nous réparer et de la dépasser.
Nous sommes finalement pris entre la douleur de l’isolement et la turbulence émotionnelle. Même si nous ne voulons pas, la vie va continuer à nous solliciter aux endroits qui ont besoin d’un travail de réparation et de prise de conscience, ce qui fait qu’il y aura toujours des chocs destinés à nous réveiller et à chaque fois le choix entre fuir ou plonger dans notre histoire.
P 412 Il y a 4 tendances principales dans notre recherche de partenaire, toutes inconscientes :
1. le partenaire de réparation : tenter d’obtenir ce que nous n’avons pas eu de l’enfance, satisfaire les besoins restés en attente,
2. le partenaire de guérison : faire resurgir nos schémas émotionnels incs en vue d’un exorcisme et d’une libération,
3. le partenaire de l’évolution : aider à la transformation d’adolescent en adulte,
4. la partenaire de réalisation : aider à la transformation d’adulte en être réalisé.
P 179 L’histoire de notre développement consiste donc à vivre les tentatives de libération qui nous sont proposées jusqu’à ce que nous construisions la vie mature avec ses 2 composantes nouvelles: l’indépendance et l’orgasme. Il y a donc apparition progressive d’un nouveau besoin, non fondé sur la vie infantile : le besoin d’orgasmer régulièrement. C’est le seul besoin instinctif individuel de la vie adulte après celui de survie biologique. Au niveau collectif, il est associé au besoin de protéger les enfants et la communauté. En dernier ressort, il peut être prolongé par l’aspiration vers une croissance qui se fait jour quand les tracas émotionnels sont en récession. cf. pyramide de Maslow
P 196 Les méthodes d’investigations ou de thérapie qui ne travaillent que sur le fantasme (registre primaire) ou sur les pensées (registre secondaire) ne peuvent accéder à la vie archaïque, seulement à ses conséquences tardives. Ce fait est la source de graves erreurs dans la théorisation psychologique et psychanalytique. Lorsque la méthode utilisée ne permet pas l’accès à la vie archaïque, ces événements restent inaccessibles et l’expression tardive de leurs effets sur le comportement reste incompréhensible. La « théorisation » associée à ces méthodes limitées d’investigation ne tiendra alors pas compte des causes réelles des problèmes et se construira à l’envers : elle prendra les conséquences tardives des traumatismes archaïques pour des sources du comportement.
P 214 Nous sommes alors dans un univers vide, vide de présence, et de ce fait vide de sens. « Donc » tout est permis ! La sensation du vide sous-tend et légitimise la toute-puissance et l’autodétermination illimitée. Il donne une liberté de choix vertigineuse, ainsi qu’une tonalité suicidaire à la vie. Une fois démontée, cette sensation de toute-puissance révèle fréquemment une occultation de la conscience collective et/ou de la spiritualité, c’est-à-dire un défaut d’intégration de ce que représente la vie et le sexe, des principes de la nature, entraînant un défaut de révérence envers le mystère du vivant et du-plus-grand-que soi.
P 231 Nous réfutons le discours classique qui met la féminité au rang de la « passivité ». Les fonctions féministes sont tout autant actives (en recherche) que celles du garçon, bien que plus orientées vers la réceptivité et la sensorialité, fonctions toutes deux actives. La réelle passivité est autre chose qui relève de troubles précoces.
P 233 Le nom du mari, l’enfantement et le maternage, ne suffisent pas pour avoir automatiquement une place dans la société.
Dans un monde excessivement masculin qui l’étouffe et l’empêche de s’épanouir, une des façons d’avoir une place est de se faire rivale en renonçant à ses atouts propres. Cela, au dépens de l’épanouissement de la féminité. Si les femmes ont, elles, à se définir elles-mêmes et à construire leur territoire et leurs espaces d’intervention féminins, il revient aux hommes de ne pas abuser de leur force physique ou organisatrice pour éliminer leurs compagnes du monde social. Il y a également nécessité que les hommes nomment quelque chose en reconnaissance de la féminité pour que les femmes n’aient pas besoin de se battre pour une légitimité de leurs fonctions naturelles.
P 241 L’homosexualité n’est plus perçue comme un malaise individuel qui se cherche une issue, mais comme phénomène social de révolte contre l’ordre établi ;
…Avant même d’être un phénomène psychologique, l’homosexualité se définit de nos jours comme un mouvement social de libération des mœurs et de droit à l’existence.
P 251 L’adolescent a besoin de transmission…pour percevoir l’acte amoureux légitime, comme tout instinct, que c’est bon pour lui et l’autre…P 351…et bon pour la société ( produire des enfants )…P 352…pour accepter ses instincts d’adulte, envie génitale et protection de la femme et des enfants. P 355 si l’ensemble des mères (n) attestent (pas) que pénétration, orgasme, grossesse et accouchement, et maternage sont bons et récompensants.
P 265 L’orgasme est un besoin essentiel naturel de l’H. et de la F., autant biologique que psychologique…il oblige à une relation à l’autre de complémentarité et de réciprocité, de complicité et de synergie, créant du rapprochement, de la reconnaissance et un lien d’intimité
P 330 Orgasmer nous enseigne que la vie, non brimée, est bonne, juste, nourrissante et bienveillante quand nous laissons faire le spontané en nous, ouvre une porte sur la vie absolue.
P 314 Chez les Amérindiens il y aurait eu égalité de la puissance masculine et féminine : l’orgasme était encouragé, enseigné et développé…il était perçu comme indispensable à l’équilibre, générateur de ressourcement et de guérison, d’ouverture affective, et de pont vers le monde spirituel. P 316 il y a des peuples où la vie orgasmique est naturelle et bienvenue.
P 278 L’établissement du réflexe orgasmique exige la libre circulation de l’énergie dans le corps…il laisse passer la joie de la vie abondante que nous recevons dans le corps, qui passe à travers nous et exprime la force de la nature jaillissant de nos profondeurs animales…forces porteuses de vie et de transcendance.
P 330 La peur de la « folie » qui entrave cet abandon… aux forces vives de la nature…au déchaînement de la vie dans le corps… par la mort du « moi », peureux et inhibiteur… n’est en fait que la peur de la vie.
P 304 Dans la plupart des cas, l’absence d’envie génitale ou la peur génitale est masquée par des envies de rapprochement pour obtenir du contact, pour avoir de l’excitation et de l’érotisme, pour chercher un sentiment de puissance ou de reconnaissance, ou pour tenter de conserver un partenaire. L’impuissance génitale est pratiquement toujours masquée sous l’allure d’une sexualité « normale » en recherche de conformité et d’invisibilité du trouble. Il est important de bien distinguer ici les envies de rapprochement sexuel basées sur des besoins infantiles de celles basées sur une envie génitale, car seule cette dernière est axée sur l’orgasme.
P 312 ( en occident…) Une partie des ( individus ) sont prisonniers du « comment éviter à tout prix l’abandon au désir et à la jouissance ». La masculinisation, ( en ce qui concerne l’inhibition chez le pôle féminin ), l’inversion de la sexuation, le refoulement ( invisible et instantané, répété et/ou massif ) du désir génital, l’investissement de l’excitation superficielle, l’évitement des pénétrations déclenchantes, sont autant de moyens d’éviter cet abandon. Derrière cette peur, il y a des histoires en général fort complexes d’identité entre mère et fille (…et un manque de père puissant et solide P 357 ) dans la honte ou dans l’impuissance orgasmique, de peur d’être une putain, ( un salaud )de confrontation à l’incompréhensible désir pour le père et à son regard sur son propre corps. Il y a aussi la peur d’être soumise à l’homme ( à la femme ) par le génital et celle d’être confrontée à sa propre avidité vaginale ( sexuelle )
P 314 Notre impuissance à jouir est enracinée dans notre acharnement à empêcher la libre jouissance du nouveau-né et à interdire à la femme la jouissance de l’accouchement (et d’une conception orgasmique ? ) et de l’allaitement ( de la période symbiotique : « congé parental »= peau de -gros-chagrin, manque de père …)
P 314 L’anthropologie fait apparaître que les dispositifs sociaux de répression de la vie sexuelle et de la jouissance concordent avec les grandes religions instituées à usage politique, ce qui semble associer les rites de naissance maltraitants avec la mégalomanie politique et « religieuse », et avec le monothéisme qui la justifie.
P 324 L’orgasme n’est pas une panacée mystique, mais simplement le résultat d’une libération des retours émotionnels et affectifs de l’enfance. Il vient donc plus facilement chez les peuples qui respectent les instincts de naissance, d’allaitement et de séparation, et qui préparent les jeunes à la vie d’adulte par des préparations sexuelles et des rites de passage. Il est le produit et la récompense naturelle de la structuration adulte qualifiée de « génitale ».
P 184 La reconnaissance pour le vécu intense d’expansion et d’abandon et hautement récompensant de l’orgasme est le prototype du sentiment.
P 335 à 337 Le monde n’est plus vide, vide de vie et vide de sens, nous n’y sommes plus seuls. La réunion existe, l’union avec nous-mêmes existe, et partant, l’union avec l’autre, et l’union avec le vrai monde… quand nous accédons à l’expérience de la plénitude de soi, à l’entièreté, à la disparition dans la vie totale du corps…
Toutes les formes d’amour que nous avions imaginées s’évanouissent dans l’illusion, et commence à poindre que c’est cette union avec nous-mêmes qui les remplace.
Il nous met en contact intime avec la force de la nature, la vie absolue, et nous met en demeure de nous incliner devant le mystère de la vie…
Au moment de l’acmé amoureuse, nous sommes au plus proche de la vie innée, du mystère de la création, aux confins du monde de l’au-delà et au sein même de ses forces impénétrables.
Entre l’orgasme et la transe, il n’y a qu’une question de source : l’orgasme s’appuie sur le réveil de la vie par l’instinct de reproduction de l’espèce qui est le plus puissant en nous, la transe s’appuie sur la danse et sur l’instinct de survie également puissant…
Tous deux exigent le même sacrifice, celui de la personnalité consciente, celui du petit « moi » inquiet, limitant et malade. Tout deux conduisent à l’ex-stase (l’état hors-de-soi), à la perte du « moi », qui laisse d’autres forces agir notre corps en tant que véhicule entre les deux mondes. Le renoncement à soi, au « moi » inhibiteur, est ce sacrifice par lequel nous pouvons nous relier à nous-mêmes et à la Nature tout entière, au « plus grand que soi » : libération du corps et confinement au sacré ne font qu’un.
Cela nous réduit à notre humble position d’homme en nous faisant perdre toute puissance infantile si difficile à réduire autrement.
Cela devrait nous amener à une révérence envers la vie et le mystère de l’existence et à un respect profond de ses lois et de ses nécessités. L’accès à un tel vécu en rapport avec cette dimension devrait amenuiser le besoin de confort, de conquête et de domination, et gommer cette conception matérialiste du monde fausse et laide, qui se fondent sur l’impuissance et la désespérance.
En plus, l’orgasme produit une ouverture à l’autre et à la souffrance qui tend à nous rapprocher en diminuant notre peur de vivre. La vie orgasmique amène le penser à sortir de sa prison doctrinaire et à s’ organiser autour d’une réalité du monde qui inclut le corps, la nature et la vie psychique.
Nous arrivons tout naturellement à l’intégration de la reproduction et du collectif comme fruits de cette jouissance. Notre peur de la mort recule devant tant d’intensité de vie vécue.
P 343 La jouissance est indissociable de la fonction d’engendrement ( enfant ) et de remplacement des générations ( mort )
P 359 Violence de l’envie génitale = jouissance =reproduction = vie.
Ce sacrifice du « moi » nous oriente aussi vers une vie riche d’autre chose, une vie qui ne serait pas finalisée sur des buts de possession et de contrôle, mais sur l’humain, sur la qualité des sensations et sur la beauté de l’existence. Il amène à ressentir de l’émerveillement devant cet incroyable phénomène qu’est la vie, du ravissement et un profond respect devant cet immense mystère qui nous vient d’un ailleurs et qui nous dépasse complètement.
Conclusion
Ce livre démontre qu’il est possible d’exprimer du « fondamental » et du complexe dans un langage clair, relativement accessible qui n’exclut pas la densité et la richesse.
Cependant la question est de savoir quelle résonance ce livre démocratique peut avoir sur un lecteur qui n’a pas eu accès à sa propre existence archaïque, à ses motivations profondes – inconscientes par un travail / soi, études… ?
En effet, certains développements ou idées sont difficiles à accepter d’emblée car ;
-soit pouvant être perçus comme réservés à des initiés, à minima familiarisés ; ayant déjà fait un certain chemin de vie et de conscience (ex :… »La perversion est un des nœuds de la construction de grandes hiérarchies sociales » p.119 ou chapitre sur « l’expansion de l’orgasme »),
-soit dérangeants, confrontants comme toute réalité, miroir…
Donc une lecture entraînant un renforcement temporaire (?) des résistances ou écho-onde de choc fragilisant des défenses, un « idéal du moi »…ou éclairant-initialisant une voie de guérison et évolution ?
Le lecteur ne peut sortir indemne de ce voyage dans un labyrinthique souterrain avec des ouvertures sur la dimension transcendante et extatique de la vie : il change le regard sur soi, donc sur l’autre et son attitude sur le sens de l’existence.
Finalement que ce soit le CCF ou tout métier relatif à l’accompagnement vers moins de souffrance, vers une libération… cet « ABC de la sexualité » est peut-être à utiliser comme un dictionnaire ; le professionnel de l’accompagnement pouvant en effet y trouver dans sa pratique quotidienne des repères et des éléments-clés de compréhension, un guide dans ce vaste champ de l’humain en recherche de réparation et de réalisation.
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Fiche de lecture
FITREMANN (Jean-Michel) –« ABC de la sexualité »-Édition GRANCHER, collection ‘’ABC’’ Paris 2004 (2002) – 463 pages – Quatre tableaux en annexe de A.1 à A.4 – Bibliographie.
Auteur et titre :
Cet ouvrage est le fruit d’une vingtaine d’années de recherche dans le domaine de la psychologie, la sexualité et la psychothérapie individuelle et de groupe sources de témoignages des thérapisants, complétant les vécus et formations personnels de l’auteur aux thérapies transférentielles et psycho-corporelles.
J. Michel Fitremann, docteur ès-sciences, ancien élève de l’école normale supérieure, psychologue clinicien spécialisé en psychopathologie, fait un travail de recherche sur la structure des psychoses en rapport avec le vécu corporel et sur les thérapies dans diverses traditions.
Il utilise dans son livre l’éclairage des grands mythes fondateurs et leur décodage pour explorer les racines profondes de l’inconscient individuel et collectif ainsi que l’apport de l’éthologie, de l’ethno et anthropologie.
Dans le cadre d’une collection « ABC », le sujet est abordé à la fois de manière exhaustive, du transgénérationnel – historique – conception… à la mort, et de manière conceptuelle dans ses aspects fondamentaux, scientifiques et spirituels tout en gardant un caractère « démocratique », plus ou moins accessible notamment grâce à un vocabulaire, autant que faire se peut, simple et notablement moins réservé, voire ésotérique ou corporatiste, que beaucoup d’ouvrages qui traitent avec sérieux de la complexité de la psyché.
Tout le contraire d’un livre de recettes ou d’initiation comme pourrait le laisser supposer ce titre « ABC », c’est une mise à disposition pour un plus large possible public de données psychologiques et existentielles fondamentales.
MOTS CLEFS
Psychologie, psychopathologie, corps, archaïque, programme, traumatisme, réparation, revécu, inconscient, émotion, sexuation, naissance, bonding-holding, père effectif, utérus externe, symbiose, fusion, lien, désir, amour, plaisir, orgasme, expansion de l’orgasme, excitation, jouissance, passion, sevrage, nature, lois naturelles, divinité, adulte, sentiment, mythe, abandon, mystère, transcendance, individuel-collectif, puissance de la vie, le plus-grand-que-soi, force animale, super-stimuli, monstre, fantasme, perversion, sadisme-masochisme, adultère-inceste, homosexualité, couple, génital, parentalité, énergie, chakra, inhibition, réflexe, instinct, répression sexuelle, Celtes, Sacré, joie corporelle, symbolique, plénitude de soi, unité, communion avec nous-même.
CONTENU
Au-delà des apparences et des comportements connus, notre sexualité est une lente construction invisible qui sous-tend tout le développement humain, personnel, mais aussi collectif.
La sexualité, thème central et sous jacent à l’ensemble de ses ramifications, est abordée avec un grand angle ; de la conception, naissance, enfantement et parentage, identité sexuelle et sociale, rôles sexuels, couples et idéologies de la sexualité, à la mort et transmission des valeurs.
En allant le plus loin possible dans les profondeurs des phénomènes psychologiques et psycho- sociaux, les racines des névroses et psychoses sont explorées : l’auteur décrit avec riches détails et explications qui se croisent comment ça se passe « quand ça se passe bien » et «quand et pourquoi ça se passe mal », dans la construction d’un individu et d’une société, évoquant également l’origine historique lointaine et les intérêts en jeu.
Notre attention est attirée sur la banalisation, la généralisation voire la normalisation de multiples idéologies et pratiques maltraitantes et traumatisantes pendant les différentes phases sensibles de construction de l’individu qui laissent des empreintes-enregistrements durables (… »on n’échappe pas à son histoire »)-cf. incs et émotionnel- sources de nos souffrances, échecs, somatisations, addictions diverses, limitations et difficultés à « grandir »…
Une myriade de pathologies – qui génère une « économie » – naît d’une société qui ne respecte pas le développement de ses individus, notamment pendant la période précoce archaïque hors de portée du souvenir conscient, relativement « oublié » et difficile d’accès ; « le normalement-névrosé » n’est pas une fatalité : c’est un « arrangement » avec une dose de résignation face à cette société maltraitante.
Ouvrage de synthèse des différents courants psychologiques-psychanalytiques – Freud, Jung, Eulagnier et leurs successeurs – et psycho-corporels émotionnels et énergétiques inaugurés par W.Reich, G.Boyesen…, son développement s’inspire aussi de manière éclectique de recherches scientifiques et de textes sacrés, avec un appui important sur les mythes, sollicitant également de nombreux auteurs contemporains.
Ecrit avec sérieux et une intention pédagogique, et certainement avec… plaisir : en effet la beauté des mots, du style traduit souvent l’émerveillement de l’auteur devant la complexité de l’humain, la puissance et les mystères de la vie ; plus spirituel que beaucoup d’écrits traitant de religion ou de spiritualité avec le mot « dieu » à chaque ligne ou paragraphe…
L’auteur fait acte et encourage à l’humilité devant les lois naturelles, le mystère du vivant, du « plus grand que soi » ; il montre la voie de la beauté de l’existence, de l’Amour (union avec nous-même) et de la réalisation de soi. Et ce notamment à travers les 80 pages consacrées à l’orgasme étayées entre autres sur une expérience d’animation de groupes « tantra ».
PHRASES et IDEES – clés
P 9 La sexualité nous trouble parce qu’elle fait resurgir nos peurs et souffrances ( et conditionnements = conflits internes ) les plus fortes alors qu’elle devrait être simple et récompensante.
P 14 La sexualité est donc une histoire de division de l’humanité, de reproduction, de filiation parents-enfants et de mort. La mort sans sexualité aurait rapidement achevé le monde ; la sexualité sans reproduction n’aurait pas de sens ni de but ; la reproduction sans la mort serait une calamité.
P 20 La pression constante de dégagement et de résolution des émotions enregistrées dans l’enfance, en même temps que nos efforts pour éviter ce dégagement, sont la motivation générale de pratiquement tous nos comportements ;…cette contradiction forme les « conflits intérieurs » et le besoin d’allégement de l’inconscient, « la compulsion de répétition ».
P 33 L’émotion est une construction complexe qui permet de gérer la relation à l’autre en tant qu’être distinct de soi. C’est un phénomène corporel de soulagement autonome des tensions lorsque l’enfant a affaire à une volonté autre que la sienne.
P 44 Ainsi, toute déviation dans le déroulement naturel de la conception, de la naissance, et du sevrage, que nous avons décrit plus haut va engendrer une anomalie de notre construction psychique, l’utilisation de procédés de survie, d’étayage ou de compensation, et une forme particulière de sexualité, de désir et de son objet, et de ses modalités d’assouvissement.
P 93 Chez les amants il y a une confusion constante entre l’état fusionnel (ce qui est bon), l’état organique (ce qui est fort), l’état extatique (ce qui est au-delà). En cherchant une rencontre charnelle qui devrait libérer et apaiser, ils ne rencontrent qu’une fusion sensorielle qui se nourrit d’un rêve et nourrit le rêve.
P 96 Pour qu’il y ait un véritable échange, il y aurait besoin de distance, d’individualité et d’indépendance.
P 102 Il n’est pas difficile de constater que dans la passion amoureuse c’est le drame de la naissance, l’appel du lien (bonding) et le besoin de symbiose qui se réactive en recherche de réparation.
P 112 La jalousie est la torture éternelle d’être dépossédé du lien à l’autre, et sa conséquence directe, la nécessité irrépressible de tuer ce qui paraît aimable, avoir un lien privilégié avec l’autre ou la vie.
P 122 Il a d’ailleurs été observé et même évalué dans les sociétés ordonnées où existent le respect de la naissance, du maternage et de la séparation, où il y a un « père collectif » puissant, que les enfants n’ont pas de traits pervers pas plus que les adultes n’ont de traits névrotiques ; Ces études ont été faites principalement chez les aborigènes d’Australie, de Nouvelle Guinée ou d’Amazonie, et ont été répétées au vu des résultats inattendus.
P 126 Devenir grand passe par constater et intégrer que nous sommes petits et impuissants devant ces gigantesques forces de vie à l’intérieur de nous et autour de nous.
P 141 Le « pouvoir » est cette recherche du contrôle absolu qui élimine l’autre. Contrôle de ses pensées pour qu’il ne puisse plus se concentrer ni évaluer. Interdit pour l’empêcher d’apprendre et de comprendre. Imposition de normes pour éliminer l’intolérable différence. Asservissement de son corps pour qu’il ne puisse ni sentir (la menace) ni réagir (en se protégeant ou en protestant). Quand on ne vit que selon soi-même, les dangereuses interactions sont écartées. La perturbation de l’autre évite la confrontation à la sienne propre. -cf. Harold Searles, « L’effort pour rendre l’autre fou ».
P 147 La nécessité pour toutes les formations émotionnelles enregistrées dans l’enfance de resurgir pour se dégager et finalement se décharger, tant que leur contenu énergétique (les tensions, la douleur) n’aura pas été dissous.
P 260 Le dégagement d’une tension psychique quelconque ne peut se faire que par mobilisation du corps.
P 153 Le but symbolique sur lequel tous deux (le sadique et le masochiste) s’accordent est en fait de prouver que « l’amour, c’est de la merde », ce qui est exactement leur enregistrement d’enfance.
P 175 Ce qui fait nous avons peu de choix :
a) nous évitons la relation, c’est-à-dire la vie, ce qui va prolonger l’attente d’un possible soulagement, et finir par nous laisser dans le désespoir d’arriver un jour à la satisfaction,
b) nous allons au feu de la relation et il nous faudra passer toutes sortes de « rendez-vous » émotionnels, qui équivalent à rejouer notre histoire d’enfance tout en tentant de nous réparer et de la dépasser.
Nous sommes finalement pris entre la douleur de l’isolement et la turbulence émotionnelle. Même si nous ne voulons pas, la vie va continuer à nous solliciter aux endroits qui ont besoin d’un travail de réparation et de prise de conscience, ce qui fait qu’il y aura toujours des chocs destinés à nous réveiller et à chaque fois le choix entre fuir ou plonger dans notre histoire.
P 412 Il y a 4 tendances principales dans notre recherche de partenaire, toutes inconscientes :
1. le partenaire de réparation : tenter d’obtenir ce que nous n’avons pas eu de l’enfance, satisfaire les besoins restés en attente,
2. le partenaire de guérison : faire resurgir nos schémas émotionnels incs en vue d’un exorcisme et d’une libération,
3. le partenaire de l’évolution : aider à la transformation d’adolescent en adulte,
4. la partenaire de réalisation : aider à la transformation d’adulte en être réalisé.
P 179 L’histoire de notre développement consiste donc à vivre les tentatives de libération qui nous sont proposées jusqu’à ce que nous construisions la vie mature avec ses 2 composantes nouvelles: l’indépendance et l’orgasme. Il y a donc apparition progressive d’un nouveau besoin, non fondé sur la vie infantile : le besoin d’orgasmer régulièrement. C’est le seul besoin instinctif individuel de la vie adulte après celui de survie biologique. Au niveau collectif, il est associé au besoin de protéger les enfants et la communauté. En dernier ressort, il peut être prolongé par l’aspiration vers une croissance qui se fait jour quand les tracas émotionnels sont en récession. cf. pyramide de Maslow
P 196 Les méthodes d’investigations ou de thérapie qui ne travaillent que sur le fantasme (registre primaire) ou sur les pensées (registre secondaire) ne peuvent accéder à la vie archaïque, seulement à ses conséquences tardives. Ce fait est la source de graves erreurs dans la théorisation psychologique et psychanalytique. Lorsque la méthode utilisée ne permet pas l’accès à la vie archaïque, ces événements restent inaccessibles et l’expression tardive de leurs effets sur le comportement reste incompréhensible. La « théorisation » associée à ces méthodes limitées d’investigation ne tiendra alors pas compte des causes réelles des problèmes et se construira à l’envers : elle prendra les conséquences tardives des traumatismes archaïques pour des sources du comportement.
P 214 Nous sommes alors dans un univers vide, vide de présence, et de ce fait vide de sens. « Donc » tout est permis ! La sensation du vide sous-tend et légitimise la toute-puissance et l’autodétermination illimitée. Il donne une liberté de choix vertigineuse, ainsi qu’une tonalité suicidaire à la vie. Une fois démontée, cette sensation de toute-puissance révèle fréquemment une occultation de la conscience collective et/ou de la spiritualité, c’est-à-dire un défaut d’intégration de ce que représente la vie et le sexe, des principes de la nature, entraînant un défaut de révérence envers le mystère du vivant et du-plus-grand-que soi.
P 231 Nous réfutons le discours classique qui met la féminité au rang de la « passivité ». Les fonctions féministes sont tout autant actives (en recherche) que celles du garçon, bien que plus orientées vers la réceptivité et la sensorialité, fonctions toutes deux actives. La réelle passivité est autre chose qui relève de troubles précoces.
P 233 Le nom du mari, l’enfantement et le maternage, ne suffisent pas pour avoir automatiquement une place dans la société.
Dans un monde excessivement masculin qui l’étouffe et l’empêche de s’épanouir, une des façons d’avoir une place est de se faire rivale en renonçant à ses atouts propres. Cela, au dépens de l’épanouissement de la féminité. Si les femmes ont, elles, à se définir elles-mêmes et à construire leur territoire et leurs espaces d’intervention féminins, il revient aux hommes de ne pas abuser de leur force physique ou organisatrice pour éliminer leurs compagnes du monde social. Il y a également nécessité que les hommes nomment quelque chose en reconnaissance de la féminité pour que les femmes n’aient pas besoin de se battre pour une légitimité de leurs fonctions naturelles.
P 241 L’homosexualité n’est plus perçue comme un malaise individuel qui se cherche une issue, mais comme phénomène social de révolte contre l’ordre établi ;
…Avant même d’être un phénomène psychologique, l’homosexualité se définit de nos jours comme un mouvement social de libération des mœurs et de droit à l’existence.
P 251 L’adolescent a besoin de transmission…pour percevoir l’acte amoureux légitime, comme tout instinct, que c’est bon pour lui et l’autre…P 351…et bon pour la société ( produire des enfants )…P 352…pour accepter ses instincts d’adulte, envie génitale et protection de la femme et des enfants. P 355 si l’ensemble des mères (n) attestent (pas) que pénétration, orgasme, grossesse et accouchement, et maternage sont bons et récompensants.
P 265 L’orgasme est un besoin essentiel naturel de l’H. et de la F., autant biologique que psychologique…il oblige à une relation à l’autre de complémentarité et de réciprocité, de complicité et de synergie, créant du rapprochement, de la reconnaissance et un lien d’intimité
P 330 Orgasmer nous enseigne que la vie, non brimée, est bonne, juste, nourrissante et bienveillante quand nous laissons faire le spontané en nous, ouvre une porte sur la vie absolue.
P 314 Chez les Amérindiens il y aurait eu égalité de la puissance masculine et féminine : l’orgasme était encouragé, enseigné et développé…il était perçu comme indispensable à l’équilibre, générateur de ressourcement et de guérison, d’ouverture affective, et de pont vers le monde spirituel. P 316 il y a des peuples où la vie orgasmique est naturelle et bienvenue.
P 278 L’établissement du réflexe orgasmique exige la libre circulation de l’énergie dans le corps…il laisse passer la joie de la vie abondante que nous recevons dans le corps, qui passe à travers nous et exprime la force de la nature jaillissant de nos profondeurs animales…forces porteuses de vie et de transcendance.
P 330 La peur de la « folie » qui entrave cet abandon… aux forces vives de la nature…au déchaînement de la vie dans le corps… par la mort du « moi », peureux et inhibiteur… n’est en fait que la peur de la vie.
P 304 Dans la plupart des cas, l’absence d’envie génitale ou la peur génitale est masquée par des envies de rapprochement pour obtenir du contact, pour avoir de l’excitation et de l’érotisme, pour chercher un sentiment de puissance ou de reconnaissance, ou pour tenter de conserver un partenaire. L’impuissance génitale est pratiquement toujours masquée sous l’allure d’une sexualité « normale » en recherche de conformité et d’invisibilité du trouble. Il est important de bien distinguer ici les envies de rapprochement sexuel basées sur des besoins infantiles de celles basées sur une envie génitale, car seule cette dernière est axée sur l’orgasme.
P 312 ( en occident…) Une partie des ( individus ) sont prisonniers du « comment éviter à tout prix l’abandon au désir et à la jouissance ». La masculinisation, ( en ce qui concerne l’inhibition chez le pôle féminin ), l’inversion de la sexuation, le refoulement ( invisible et instantané, répété et/ou massif ) du désir génital, l’investissement de l’excitation superficielle, l’évitement des pénétrations déclenchantes, sont autant de moyens d’éviter cet abandon. Derrière cette peur, il y a des histoires en général fort complexes d’identité entre mère et fille (…et un manque de père puissant et solide P 357 ) dans la honte ou dans l’impuissance orgasmique, de peur d’être une putain, ( un salaud )de confrontation à l’incompréhensible désir pour le père et à son regard sur son propre corps. Il y a aussi la peur d’être soumise à l’homme ( à la femme ) par le génital et celle d’être confrontée à sa propre avidité vaginale ( sexuelle )
P 314 Notre impuissance à jouir est enracinée dans notre acharnement à empêcher la libre jouissance du nouveau-né et à interdire à la femme la jouissance de l’accouchement (et d’une conception orgasmique ? ) et de l’allaitement ( de la période symbiotique : « congé parental »= peau de -gros-chagrin, manque de père …)
P 314 L’anthropologie fait apparaître que les dispositifs sociaux de répression de la vie sexuelle et de la jouissance concordent avec les grandes religions instituées à usage politique, ce qui semble associer les rites de naissance maltraitants avec la mégalomanie politique et « religieuse », et avec le monothéisme qui la justifie.
P 324 L’orgasme n’est pas une panacée mystique, mais simplement le résultat d’une libération des retours émotionnels et affectifs de l’enfance. Il vient donc plus facilement chez les peuples qui respectent les instincts de naissance, d’allaitement et de séparation, et qui préparent les jeunes à la vie d’adulte par des préparations sexuelles et des rites de passage. Il est le produit et la récompense naturelle de la structuration adulte qualifiée de « génitale ».
P 184 La reconnaissance pour le vécu intense d’expansion et d’abandon et hautement récompensant de l’orgasme est le prototype du sentiment.
P 335 à 337 Le monde n’est plus vide, vide de vie et vide de sens, nous n’y sommes plus seuls. La réunion existe, l’union avec nous-mêmes existe, et partant, l’union avec l’autre, et l’union avec le vrai monde… quand nous accédons à l’expérience de la plénitude de soi, à l’entièreté, à la disparition dans la vie totale du corps…
Toutes les formes d’amour que nous avions imaginées s’évanouissent dans l’illusion, et commence à poindre que c’est cette union avec nous-mêmes qui les remplace.
Il nous met en contact intime avec la force de la nature, la vie absolue, et nous met en demeure de nous incliner devant le mystère de la vie…
Au moment de l’acmé amoureuse, nous sommes au plus proche de la vie innée, du mystère de la création, aux confins du monde de l’au-delà et au sein même de ses forces impénétrables.
Entre l’orgasme et la transe, il n’y a qu’une question de source : l’orgasme s’appuie sur le réveil de la vie par l’instinct de reproduction de l’espèce qui est le plus puissant en nous, la transe s’appuie sur la danse et sur l’instinct de survie également puissant…
Tous deux exigent le même sacrifice, celui de la personnalité consciente, celui du petit « moi » inquiet, limitant et malade. Tout deux conduisent à l’ex-stase (l’état hors-de-soi), à la perte du « moi », qui laisse d’autres forces agir notre corps en tant que véhicule entre les deux mondes. Le renoncement à soi, au « moi » inhibiteur, est ce sacrifice par lequel nous pouvons nous relier à nous-mêmes et à la Nature tout entière, au « plus grand que soi » : libération du corps et confinement au sacré ne font qu’un.
Cela nous réduit à notre humble position d’homme en nous faisant perdre toute puissance infantile si difficile à réduire autrement.
Cela devrait nous amener à une révérence envers la vie et le mystère de l’existence et à un respect profond de ses lois et de ses nécessités. L’accès à un tel vécu en rapport avec cette dimension devrait amenuiser le besoin de confort, de conquête et de domination, et gommer cette conception matérialiste du monde fausse et laide, qui se fondent sur l’impuissance et la désespérance.
En plus, l’orgasme produit une ouverture à l’autre et à la souffrance qui tend à nous rapprocher en diminuant notre peur de vivre. La vie orgasmique amène le penser à sortir de sa prison doctrinaire et à s’ organiser autour d’une réalité du monde qui inclut le corps, la nature et la vie psychique.
Nous arrivons tout naturellement à l’intégration de la reproduction et du collectif comme fruits de cette jouissance. Notre peur de la mort recule devant tant d’intensité de vie vécue.
P 343 La jouissance est indissociable de la fonction d’engendrement ( enfant ) et de remplacement des générations ( mort )
P 359 Violence de l’envie génitale = jouissance =reproduction = vie.
Ce sacrifice du « moi » nous oriente aussi vers une vie riche d’autre chose, une vie qui ne serait pas finalisée sur des buts de possession et de contrôle, mais sur l’humain, sur la qualité des sensations et sur la beauté de l’existence. Il amène à ressentir de l’émerveillement devant cet incroyable phénomène qu’est la vie, du ravissement et un profond respect devant cet immense mystère qui nous vient d’un ailleurs et qui nous dépasse complètement.
Conclusion
Ce livre démontre qu’il est possible d’exprimer du « fondamental » et du complexe dans un langage clair, relativement accessible qui n’exclut pas la densité et la richesse.
Cependant la question est de savoir quelle résonance ce livre démocratique peut avoir sur un lecteur qui n’a pas eu accès à sa propre existence archaïque, à ses motivations profondes – inconscientes par un travail / soi, études… ?
En effet, certains développements ou idées sont difficiles à accepter d’emblée car ;
-soit pouvant être perçus comme réservés à des initiés, à minima familiarisés ; ayant déjà fait un certain chemin de vie et de conscience (ex :… »La perversion est un des nœuds de la construction de grandes hiérarchies sociales » p.119 ou chapitre sur « l’expansion de l’orgasme »),
-soit dérangeants, confrontants comme toute réalité, miroir…
Donc une lecture entraînant un renforcement temporaire (?) des résistances ou écho-onde de choc fragilisant des défenses, un « idéal du moi »…ou éclairant-initialisant une voie de guérison et évolution ?
Le lecteur ne peut sortir indemne de ce voyage dans un labyrinthique souterrain avec des ouvertures sur la dimension transcendante et extatique de la vie : il change le regard sur soi, donc sur l’autre et son attitude sur le sens de l’existence.
Finalement que ce soit le CCF ou tout métier relatif à l’accompagnement vers moins de souffrance, vers une libération… cet « ABC de la sexualité » est peut-être à utiliser comme un dictionnaire ; le professionnel de l’accompagnement pouvant en effet y trouver dans sa pratique quotidienne des repères et des éléments-clés de compréhension, un guide dans ce vaste champ de l’humain en recherche de réparation et de réalisation.
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