« La Mâle peur »
Les vertus des caresses (et massages)
Tout d’abord ce sont d’excellents tranquillisants : elles apaisent l’anxiété et la peur ; elles font céder les tensions nerveuses, elles procurent un heureux bien-être, voire une réelle euphorie. A cet égard, elles sont l’égal de l’alcool ou des médicaments anxiolytiques.
Ces bienfaits relèvent de causes biologiques : la sécrétion des substances du plaisir. Ils ont également des fondements psychologiques : le toucher est un langage, il communique la tendresse, il affirme la fin de la solitude, il sécurise.
Les caresses ont un pouvoir anti-dépression car elles associent les qualités des meilleurs anti-dépresseurs : l’anxiolyse et l’euphorie. Je suis persuadé qu’elles pourraient accélérer la guérison de bien des dépressions, en particulier de celles qu’on appelait réactionnelles (avant le D.S.M. III), permettant ainsi de réduire les doses de médicaments. Il n’y a pas de mystère à cela : la caresse agit, comme les thymo-analeptiques, en favorisant la sécrétion ou l’action des neuro-transmetteurs et des neuro-hormones de la bonne humeur. Toutes les maladies mentales pourraient bénéficier des stimulations cutanées. Je connais plusieurs cas de schizophrénie guéris par la tendresse.
Les caresses ont également un formidable pouvoir défatigant. Tout se passe comme si entre la main qui caresse et le corps du receveur – ou entre les deux corps qui se pressent – s’établissait un échange d’énergie. La chaleur de la peau, ses charges magnétiques et d’autres radiations encore inconnues qu’elle émet, participent à cet échange. On peut aussi penser que les contacts cutanés rétablissent les circulations énergétiques le long des méridiens d’acupuncture. On peut enfin penser que, selon les principes des réflexothérapies, une stimulation cutanée entraîne des réactions vaso-motrices et décontracturantes au niveau des muscles et des viscères.
L’inestimable effet décontracturant des caresses, et plus spécialement des massages, est bien connu. Or depuis Reich, nous n’ignorons plus à quel point la répression incessante de nos pulsions rigidifie notre musculature jusqu’à en faire une carapace. Et, depuis Selyé, nous savons combien les stress répétés crispent nos muscles. Les caresses dénouent nos masses musculaires selon les mécanismes évoqués ci-dessus.
Enfin la caresse peut améliorer notre esthétique. La morphopsychologie nous a appris que les attitudes vicieuses et les déformations sont liées à des contractures musculaires ; en détendant les muscles, la caresse nous procure un port harmonieux et une démarche souple. Au niveau de la peau elle-même, la caresse a des effets très bénéfiques : par la vaso-dilatation qu’elle y crée, elle la revitalise ; par la décrispation des muscles sous-cutanée qu’elle entraîne, elle s’oppose à la formation de rides. Il est vrai que la beauté, l’harmonie des traits et des attitudes traduisent un bien-être interne.
Inversement, l’absence de caresses entraîne de nombreux maux. C’est que le besoin de contacts cutanés est un besoin universel et fondamental, aussi impératif que le besoin d’hygiène et de nutriment. Les caresses sont indispensables à l’équilibre physique et psychologique des individus. Chez l’enfant carencé le développement psycho-moteur est ralenti ; des troubles caractériels s’installent et l’on voit apparaître plus fréquemment de l’eczéma, de l’asthme ou des gastro-entérites. Chez l’adulte frustré se développe insidieusement une tendance à la mélancolie et des maladies psychosomatiques ; combien de migraines, de douleurs cervicales et dorsales, d’ulcère et de colites ne sont que des appels à être touchés.
Vous le voyez, la caresse aux mille vertus est une autre façon de guérir de plaisir. Pour en savoir plus, reportez-vous au Traité des Caresses (même auteur).
Le rendez-vous de la femme et de l’homme
La caresse pourrait être le geste qui fonde la relation nouvelle entre la femme et l’homme ; elle pourrait être le rendez-vous d’une femme nouvelle avec un homme nouveau. Le rapprochement extrême de ces deux êtres est le corps à corps. Le coït peut n’être qu’un télescopage, une épreuve de force qui tourne à la domination de l’un – la femme ou l’homme – ; la caresse, elle, implique l’égalité des rôles, des initiatives et des plaisirs ; elle exclut toute appropriation et exploitation ; elle est antisexiste.
Gérard LELEU voir aussi « Le traité des caresses » au éd° j’ai lu – poche